Écrivez-nous une anecdote justifiant votre future appartenance au groupe
LIKE A VIRGIN.
★ ATTENTION ★
Pour plus de piment, je m'engage à inclure les mots JOIE , MANTEAU et MENTON dans mon oeuvre . Trop coul.
JE SUIS VENUE TE DIRE QUE JE M'EN VAIS-Une tentative de suicide ? Mais où avais-tu la tête, Andromeda ? Dans les toilettes de ton lycée, en plus de ça ! Tu ne pouvais trouver circonstances plus glauques. Et que va-t-on penser de moi, maintenant ? cette idée t-a-t-elle seulement traversé l’esprit ? Je n’oserai plus jamais retourner à l’église en sachant que ma petite-fille a tenté de s’ôter la vie que Dieu lui a si généreusement offerte. Que va penser le Père Antoine en l’apprenant ? Que j’ai été une mauvaise grand-mère incapable d’éduquer correctement sa progéniture ? Vraiment, ma petite, j’en mourrais de honte. Décidemment, je n’ai pas eu de chance avec ma descendance. Entre ma débauchée de fille et toi, la petite dépressive, c’est sûr que je n’ai pas été gâtée… Hé bien ? Qu’as-tu à dire pour ta défense ?
-Je suis… sincèrement désolée.
-Que vais-je faire de toi, maintenant ? Ah, on peut dire que tu m’as mise dans de beaux draps. Je ne peux plus reculer, maintenant, j’ai promis que je m’occuperai de toi. Hors de question que ta mère te prenne en charge, elle n’a aucun sens des responsabilités.
-De toute manière, elle n’a aucune envie de s’occuper de moi, grand-mère, tu le sais bien.
-Ho, il suffit ! Tes petites réponses déprimées commencent à me taper sur les nerfs ! Mais sérieusement, à quoi pensais-tu ? Que tous tes soucis disparaîtraient avec la mort ? Tu serais allée brûler en enfer, ma petite ! Une chance que tes professeurs t’aient empêché de commettre l’irréparable… tu t’en serais mordue les doigts, crois-moi ! Je me demande ce qu’ils peuvent bien penser de toi. Il est hors de question que tu remettes les pieds dans cet établissement ! Tu peux dire au revoir à tous tes petits camarades dès ce soir. Non, d’ailleurs, je préfère même que tu ne les revoies pas. Cela vaut mieux.
Andromeda n’osa pas répondre à Georgia que de toute manière, elle n’avait aucun « petit camarade » à qui faire ses adieux. Au lycée, elle n’avait aucun ami, et ce depuis l’école primaire. On la jugeait trop gentille, trop effacée, trop timide pour susciter l’attention. C’était en partie à cause de ces sombres crétins qu’elle avait tenté de se suicider dans les toilettes du lycée.
De son coté, Georgia avait repris son soliloque réprobateur.
-Je pense qu’il est plus sage que tu quittes la maison. Après tout, tu as dix-huit ans, rien ne m’oblige à te garder plus longtemps à la maison. J’avais dit à ta fille de joie de mère que je me chargerai de toi jusqu’à ta majorité, c’est chose faite.
Andromeda en resta bouche bée mais ne fit aucune réflexion. Comment ? Sa grand-mère l’éjectait de la demeure familiale ? Mais elle n’avait nulle part où aller, personne pour l’accompagner, pas d’argent ni de logis !
-Une amie m’a parlé d’un centre de redressement très réputé à deux cents kilomètres d’ici. Ce sera ton nouveau domicile dès la semaine prochaine.
Un centre de redressement ? Pour quoi faire ? Andromeda savait pertinemment que cela n’aurait aucun effet sur elle, mais n’exposa cependant pas son point de vue réfractaire à sa grand-mère. Elle en avait assez fait pour aujourd’hui, inutile d’en remettre une couche. Elle monta dans sa petite chambre en pensant que c’était l’une des dernières fois qu’elle y dormirait. Etonnamment, cela ne l’attristait pas plus que ça. Après tout, elle n’avait pas d’amis, pas de repères à Bari, rien ne l’attachait à ce petit village de province italienne.
Le lendemain, elle entreprit de préparer son sac. Elle n’y mit pas grand-chose. Georgia lui avait imposé un format et un poids maximal. C’est donc avec grand regret qu’Andromeda abandonna sa guitare. C’était bien la seule chose qui aurait pu lui remonter le moral. Mais elle n’était pas de taille à lutter contre l’autorité grand-maternelle, aussi se résigna-t-elle à n’emporter que du papier, ses économies, quelques vêtements et une trousse de toilette. Le lundi suivant, elle embrassa sa grand-mère, le cœur un peu serré, pris son manteau et quitta la demeure familiale en refermant tout doucement la porte derrière elle.
GUESS THINGS HAPPEN THAT WAY-Mademoiselle Sabloni… Je vois dans votre dossier que cela fait deux ans que votre grand-mère, Georgia Sabloni, vous a envoyé en pension dans ce centre. Pouvez-vous me rappeler les causes de ce choix ?
-J’avais fait une tentative de suicide dans mon ancien lycée…
-Ah oui, c’est cela. Ecoutez, le centre de redressement Maria Solvarez accueille de jeunes gens issus de tous les horizons depuis une décennie afin de les remettre dans le droit chemin. Mais je dois avouer que votre cas me laisse perplexe. En deux ans, aucune amélioration de votre état n’a été relevée. Il y a un mois encore, Henrietta m’annonçait que vous aviez tenté de vous… Enfin… Vos pulsions suicidaires sont toujours d’actualité, n’est-ce pas ?
-Il faut croire que oui, répondit Andromeda d’une voix faible. Elle se reprocha aussitôt la trace d’ironie dans sa voix.
-Il m’est difficile de devoir vous annoncer cela, mademoiselle, mais il est de l’avis de la direction du centre que si aucune amélioration n’est notoire en deux ans, alors il est fort possible que nous ne puissions rien faire pour vous.
Andromeda tressaillit. Certes, elle savait que c’était pour une annonce de ce genre que la directrice du centre Maria Solvarez l’avait convoquée dans son bureau. Mais tout de même, la renvoyer du centre ! Et maintenant, qu’allait-elle faire ? Sa grand-mère était peut-être déjà au courant. Les chances pour qu’elle reprenne Andromeda sous son aile étaient minimes, la jeune femme le savait.
-C’est pourquoi nous sommes au regret de devoir vous exclure du centre de redressement, mademoiselle Sabloni.
Voilà, c’était dit. Et maintenant ? Où aller ? Cette fois-ci, Georgia n’était pas là pour imposer à sa petite-fille la direction à suivre. Andromeda se dit qu’il fallait qu’elle se débrouille seule. Elle ne voulait pas déranger sa pauvre grand-mère avec ses histoires d’exclusion, de dépression et de suicide. Georgia avait besoin de repos et de tranquillité, après dix-huit années à s’être occupée d’elle.
-Bien, je comprends parfaitement votre décision, madame. Cependant, j’aimerais avoir votre avis sur mon avenir. Que devrais-je faire, maintenant ? M’installer en ville, fonder une famille, trouver un nouveau centre de redressement, reprendre mes études ?
-Mademoiselle Sabloni, sachez que j’apprécie le calme et la sagesse avec lequel vous abordez cette affaire, aussi je me ferai un plaisir de vous aider. Ecoutez, vous n’avez que vingt ans, et je vous pense trop jeune pour vous poser quelque part et vivre votre vie comme s ‘il ne s’était rien passé. Cependant, joindre un nouveau centre de redressement serait à mon avis bien inutile. Rappelez-vous, nous n’avons noté aucun progrès de votre état en deux ans… Quant à vos études… Vous avez un excellent dossier, et il me semble que c’est justement au lycée que vous aviez fait votre première tentative de suicide... Aussi, je vous le déconseille.
Andromeda baissa la tête, déçue et dépitée. Aucune de ses propositions n’était sensée, la directrice avait raison.
-Il va falloir que vous quitte, madame. Merci pour tout, et pour tous vos efforts durant ces deux ans.
La directrice lui adressa un sourire encourageant dans lequel la jeune femme décela une trace de pitié.
-Dieu vous garde, mon enfant !
Andromeda releva soudainement la tête, comme illuminée, les yeux brillants. Elle l’avait, sa solution ! Dieu vous garde… Mais oui, c’était évident ! Raisonnable, sage, serviable, croyante, élevée par une grand-mère très catholique… La petite Sabloni se devait d’entrer au couvent.
HEAVEN CAN WAITAndromeda, tout intimidée, s’avança dans le long corridor aux murs de plâtre défraichi et râpé. Au fond, une vieille porte branlante, qui grinçait en s’entrebâillant au gré du vent qui pénétrait dans le couloir par les petites lucarnes. Les rayons de soleil froids en ce mois de janvier dévoilaient la poussière jaune qui flottait mollement le long des murs. La jeune femme frappa à la porte. Une voix éraillée entrecoupée d’une quinte de toux lui intima d’entrer. Relevant le menton pour se donner fierté et contenance, Andromeda pénétra dans une vaste salle, basse de plafond et illuminée par d’immenses fenêtres. La mère supérieure était assise sur un petit tabouret qui semblait trop petit et fragile pour supporter qui que ce soit.
-Vous devez être Andromeda Natalia Sabloni, la jeune femme dont m’a parlé la directrice du centre de redressement Maria Solvarez ?
-C’est cela. Je suis venue pour intégrer votre couvent.
-Ce serait un plaisir, mais il me faut d'abord vos raisons, jeune fille.
-Tout d’abord, je suis une fervente croyante en Dieu, croyez-moi. De plus, je pense que je serais mieux ici qu’en centre de redressement. Je suppose que vous n’êtes pas sans savoir que j’ai déjà fait quelques tentatives de suicide au cours de ma vie… Cependant, je suis déterminée à rejoindre le droit chemin grâce au convent. J’y serais sans doute plus à l’aise, ce qui facilitera sans aucun doute mon rétablissement. De plus, être entourée d’autres personnes qui, comme moi, partage une foi inébranlable en Dieu me serait bénéfique.
Andromeda poursuivit son discours quelques minutes encore. Pour la première fois de sa vie, elle prenait peu à peu confiance en elle au fur et à mesure que son argumentation progressait. Cependant, en face d’elle, le visage de la mère Supérieure demeurait désespérément impénétrable. Et pourtant, lorsque la jeune femme se tut enfin, il se fendit d’un sourire bienveillant et satisfait.
-Vous m’avez tout l’air d’une jeune femme pleine de bonté. Voyez-vous, nous manquons ici cruellement de jeunes gens comme vous, serviables, doux, généreux tout en restant fidèle à Dieu. C’est pourquoi, mademoiselle Sabloni, je serai ravie de vous accueillir au couvent de San Marco.